Deux mètres au dessus du sol
« On ne traverse pas la France pour jouer à moitié. On sera là ! S’il faut se battre chaque week-end pendant une heure, on donnera tout. » Gauthier Schmitt a 18 ans et fait partie de la vague venue de l’est de la France qui débarque à Saint-Claude en Nationale 1 avec Thomas il y a un an et maintenant Jérémy, Grégoire et lui-même.
Gauthier a tapé dans l’œil d’Olivier. Il rentre parfaitement dans le projet. Très jeune, 18 ans, dans un groupe qui a besoin de se régénérer mais aussi très physique : 198 cm pour 96 kilos. Un physique qui n’est pas arrivé là par hasard. « Lorsque j’avais 14 ans j’ai intégré le Pôle Espoir. A l’époque je faisais déjà 185 cm mais pour à peine plus de 60 kilos. Au bout d’un an, on m’a expliqué que je n’étais pas conservé. J’ai pris un sérieux coup sur la tête car à cet âge, quand tu rentres au Pôle, tu penses déjà que tu seras professionnel à coup sûr. Alors je me suis remis en question. J’ai arrêté le handball pendant un an pour me consacrer à la musculation. »
Gauthier explique très simplement que lorsque tu approches des deux mètres, il est indispensable de prendre de la caisse. « Tu peux être fin si tu mesures 175 cm par exemple, mais quand tu es aussi grand, c’est impossible, sinon tu n’as pas d’avenir car notre centre de gravité fait qu’on perd très vite l’équilibre et c’était ça mon gros problème. Quand je suis revenu au handball, j’étais enfin un vrai arrière qui peut à la fois être efficace en un contre un, tirer de loin et surtout jouer pour le collectif : ce que je préfère. »
Le handball, il y est venu tard. Comme son père, il a débuté par le judo. Mais à l’âge de 13 ans et une ceinture marron en poche, lorsqu’il a su qu’il devait attendre cinq ans pour passer la noire, il a demandé à son père, qui lui aussi a connu une carrière en Nationale 1 à Folschviller, de faire du handball. Ainsi, par intermédiaire, ce n’est autre que Jean-Luc Thiébaut, 144 sélections au poste de gardien de but en équipe de France et médaillé de bronze à Barcelone en 92 et d’argent aux mondiaux de 93, qui lui a mis le pied à l’étriller : Gauthier passera quatre ans à Metz. Grâce au judo, il avait déjà quelques prédispositions pour notre sport, notamment en défense.
Au moment de quitter la catégorie U18 France il y a un an, il a signé un contrat pro au Luxembourg. L’aventure fût un échec. C’est donc, en cours de saison, l’ancien club de son père, Folschviller, qui va le récupérer. Mais la mutation se faisant tardivement, il ne put être qualifié : aucun match disputé. C’est donc un garçon très revanchard qui va nous rejoindre : en demande de prouver.
Mais comment ce jeune homme de 18 ans se retrouve t-il à nous rejoindre : à changer de vie ?
« Thomas a mis Olivier et Grégoire en contact. A ce moment là, le coach a demandé à Grégoire s’il connaissait un jeune arrière gauche. Et me voilà. Olivier a vu des vidéos de moi et s’est renseigné. Il m’a appelé, puis j’ai eu une discussion avec Françoise Petrov. Nous nous sommes très vite entendu. Je suis très motivé à venir. Tout d’abord parce que j’arrive dans un super club : très structuré. J’ai pu me rendre compte au Luxembourg que ce n’était pas le cas partout. Et puis, parce que le sud de la France m’attire beaucoup. Si je veux changer de vie, c’est maintenant, à 18 ans, je n’ai rien à perdre. »
Gauthier s’est entouré de beaucoup de conseils. « On m’a expliqué que ce type d’opportunité faisait partie d’une vie et qu’il fallait les saisir. Qu’à mon âge, je n’avais rien à perdre. Je suis très motivé pour réussir. On m’a encouragé. » Gauthier sait aussi qu’il arrive dans un groupe d’expérience au mental que la France entière connaît. « Je ne veux pas mentir, je ne connais pas encore les garçons. Mais j’ai vu des matchs. Du plus, je devais venir passer quelques jours ici, mais en raison du confinement se fût annulé. Mais c’est un honneur de rejoindre un groupe avec des joueurs qui ont une grande carrière. De plus, je vais arriver dans un effectif très fort mentalement et très solidaire. On m’a parlé du début de saison en Nationale 1, les défaites, conclu par un maintien, rien ne se fait par hasard. Je vais apprendre énormément à leurs côtés. J’ai hâte. Quand tu es jeune, c’est comme ça que tu progresses. »
Ce grand fan de RAP américain et français et de jeux vidéos en ligne, possède une tête bien faîte et utilise à bon escient tous les conseils qu’il reçoit. « Le handball j’y jouerais tant que mon physique me le permettra. Si un jour j’ai la chance de grimper encore de niveau et devenir professionnel j’irai mais jamais sans négliger mes études. Je sais que certains garçons, qui n’ont connu que le handball dans leur vie, se retrouvent à 35 ans à devoir retourner sur les bancs de l’école et que c’est une vraie galère. On m’a prévenu de ne jamais abandonner mes études et d’aller au bout. »
Gauthier va rejoindre une école de commerce à Nice. Son but, intégrer une option banque pour valider un BAC + 3 puis un BAC + 5 pour devenir directeur d’agence. « Il y a un an j’ai entrepris des études qui au final n’étaient pas faîtes pour moi. J’ai arrêté mais je ne suis pas resté sans rien faire. J’ai enchaîné les petits boulot et droite et à gauche. Ça m’a fait grandir. Je me suis endurci. »
En attendant de nous rejoindre, Gauthier profite près d’un plan d’eau, à proximité de son domicile, d’un parcours de crossfit. « On y va tous les soirs avec mes deux meilleurs amis. Je rassure tout le monde, j’ai toujours mon attestation et on respecte les gestes barrières : une heure seulement. On est obligé d’y aller et de revenir en courant car si on marche et qu’on se fait contrôler, on ne pourra pas justifier l’activité physique. » Gauthier a donc cette chance de ne pas faire une pause totale physiquement. De bon augure pour son arrivée chez nous.